EMAGE EVALUATION
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2.2
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1.6
Sciences
Corporation
23 WEST MAIN STREET
WEBSTER, N.Y. 14580
(716) S72-4503
CIHM/ICMH
Microfiche
Séries.
CIHIVI/ICMH
Collection de
microfiches.
Canadien Instituta for Historical Microreproductions / Institut canadien de microreproductions historiques
Technical and Bibliographie Notes/Notas tachniquas et bibliographiquas
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30î:
■/ j
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Th« copy filmad hera hat b««n raproducad thanka
to tha ganaroaity of :
Législature du Québec
Québec
Tha imagaa appaaring hara ara tha baat quaiity
poaaibla conaidaring tha condition and lagibility
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fllming contract spacificationa.
L'axamplaira filmé fut raprodult grftca à la
généroaité da:
Législature du Québec
Québec
Laa imagaa auivantaa ont été raproduitaa avac la
plua grnnd aoin, compta tanu da la condition at
da la nattaté da l'axamplaira filmé, at an
conformité avac laa conditiona du contrat da
fllmaga.
Original copiaa in printad papar covara ara filmad
baginning with tha front covar and anding on
tha laat paga with u printad or iiluatratad impraa-
sion, or tha back covar whan appropriata. Ail
othar original copiaa ara filmad baginning on tha
first paga with a printad or iiluatratad impraa-
sion, and anding on tha laat paga with a printad
or iiluatratad impraaaion.
Tha laat racordad framj on aach microficha
shall contain tha symboi — ♦•(maaning "CON-
TINUED"). or tha svmbol V (maaning "END"),
whichavar appliaa.
Mapa, plataa, charta, atc, may ba filmad at
diffarant raduction ratioa. Thoaa too larga to ba
antiraly includad in ona axpoaura ara filmad
baginning in tha uppar laft hand cornar, left to
right and top to bottom, aa many framaa aa
raquirad. Tha following diagrama iiluatrata tha
mathod:
Laa axamplairaa originaux dont la couvartura an
papiar aat impriméa sont Utmés an commançant
par îa pramiar plat at an tarminant soit par la
darniéra paga qui comporta una smprainta
d'impraasion ou d'illuatration, soit par la sacond
plat, salon la caa. Toua laa autraa axamplairaa
originaux sont filmés an commançant par la
pramiéra paga qui comporta una amprainta
d'impraaaion ou d'illuatration at an tarminant par
la derni«ra paga qui comporta una taila
amprainta.
Un daa aymbolaa uuivanta apparaîtra sur la
darniéra image da chaque microficha, salon la
cas: la symbola —»- signifia "A SUIVRE", la
symbola V signifia "FIN".
Laa cartaa, planchaa, tablaaux. atc, pauvant étra
filméa à daa taux da réduction différants.
Loraqua la document aat trop grand pour étra
reproduit an un seul cliché, il eat filmé à partir
da l'angle supérieur gauche, de gauche à droite,
et de haut an ba**, an prenant le nombre
d'imagea néceasaira. Las diagrammea suivants
illustrant la méthode.
1
2
3
4
S
6
I
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^ V-\.- I J * <H « ^ —
^l'\A.~' t.
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.,,'. . r. L -i -t ''«>..(»,
Kxrii.MT nr ijulletin de la sociktk dk (jkogrmmiir
(.Juin 187r>.)
,te
L'ORIGINE DU NOM r/AMÉRIQUE
Par JulcN IHARCOII.
Amérique, Aincrriquc ou Amcric, est un nom de lieu
dans le Nicaraguii, qui désigne les hautes lorrcs ou chaîne
de montagnes entre Juigalpaet Liherlad, province de Chon-
lales; et qui se prolonge, d'un côté, dans le pays des In-
diens Carcas, et de l'autre, dans celui des Indiens Hamas.
Les rios Mico, Artigua, Carca, formant le rio IJlewfields; le
rio Grande Matagalpa et les rios Itama et Indio, qui se jet-
tent directement dans l'Atlantique, ainsi que les rios Co-
inoapa, Mayales, Acoyapa, Ajocuapa, Oyale et Tcrpenagua-
lapa, qui su jettent dans le lac de Nicaragua, prennent tous
leurs sources dans les montagnes d'Amérique (1).
La terminaison en ique ou k se trouve souvent dans les
noms de lieux des langues iniliennes de l'Amérique oen-
Irale. Klle paraît vouloir dire grande, élevée, proémineute, et
elle s'applique toujours h des lignes de faîtes ou à des pays
montagneux, élevés, mais sans volcans. Ainsi : ^iqtie et
Aglasint(/(tt', dans le Daricn(Colomhie); Tncavùjue et Amér-
ique, dans le Nicaragua; AmixUque, ManahàyMf, Chappar-
rislfVjfitc, Lepater/c/HC, L\o[iq(ie et A'inlevique dans l'Honduras ;
AtenqujVyftc au Mexique; Tact/c et Poloch/c dans le Guate-
mala; Tepi'c, AcateV et MesquitiC dans le Jalisco. On pour-
rait facilement donner une plus longue liste de noms de
lieux ou autres indiens, qui se terminent en ique ou te,
comme cacique ou grand chef.
Maintenant l'on sait par les nomhreuses études d'érudi-
tion exécutées pendant ces dernières vingt-cinq années sur
l'origine des noms de lieux, qu'il n'y a rien de plus solide-
ment établi que les dénominations locales. Môme les con-
(1) Voir ; divers documents nfficinls du pouvorncment de Nicar,if;u;< ot
TliC naturalist in Nicaraniia. \>y Thomas Holt, H vol I.ondon, lfi73.
2 sin i.tiiur.iNn nu nom iiAMi;ui<jrc.
quOlcs les plus absolues, si l'on no parvient pas h exterminer
enlièrcmcnl la race aboiigcnc qui hahilail le pays, ne peu-
il eflV
ili
3ment les noms de loealilés, ou lieux d il s,
suivant l'expression française. Ces noms peuvent Ctre léfrè-
rcment modifiés, en les épelant avec des variations, mais le
son primitif reste. D'ailleurs, 1;\ même où la race aborip;ène
disparaît totalement, on conserve souvent les noms de
lieux, au moins comme synonymes; ainsi qu'on en a de
nombreux exemples au Canada, dans la Nouvclle-Angle-
tnrrc et dans l'Ktat de New-York.
La question est de savoir si ce mot Amérique ou Amcric,
qui d6si{jfne une partie du pays de terre ferme, découverte
])ar Cristoforo Colombo, pendant son quatrième et dernier
voyage de découvertes dans le Nouveau, Monde, a été
connu du grand navigateur; et par suite a pu ôtre répété
par lui ou par ses compagnons de voyage. De certitude, il
n'y en a pas, du moment que le mot ne se trouve pas dan>
le récit fort écourlé d'ailleurs qu'il nous en a laissé. Mais
«■omme l'ajjparition du mot Amérique est restée une énigme,
malgré les interprétations et versions qu'on en a données; cl
comme pour une solution, on en est réduit ;\ reconnaître
que Vespuchy n'est pour rien dans cette dénomination,
inconnue de lui; (d qu'un libraire d'une petite ville perdu.'
dans les Vosges est le créateur du nom Ameiici, qui n'était
mdiement le véritable prénom de Vespucci ou Yespucby;
il n'est peut-être pas bors de propos de passer en revue les
faits, et de montrer de quel côté sont les plus grandes pro
babilités, pour arriver i\ connaître d'où nous vient ce grand
nom d'Amérique, qui remplit i\ lui seul tout un hémi-
sphère.
Cristoforo Colombo, dans sa leltera rarissiina où il décrit
en abrégé son quatrième voyage, li")02 à 1503, dit qu'après
avoir i)assé le cap Gracias a Bios sur la côte des INIosquitos,
il arriva h la rivière du Désasire, qui est le rio Grande Ma-
lagalpa; puis, quelques jours après, il s'arrêta à un villago
■
'T^lp^-iw.fMr-^
»5rt^!à(ipi-^
srii I. oiuuLMi lu: m».m h'Ajii.uigut:. '.\
tiii leri'13 nommé Ciiriaï, ou (laiiny, où il resta (|iiel(iuo
U'inps pour réparci' ses vaisseaux et faire reposer ses gens.
Là, lt:s hahilanls lui parlèrent beaucoup de mines d'or, ce
(pii était l'objet principal de ses recherches; on le conduisit
à un autre village nommé Garambaru, où les indigènes por-
taient à leur cou d3s miroirs d'or. Ces Indiens lui nommè-
rent plusieurs lieux où se trouvaient beaucoup do mines
d'or, l'endroit le dernier nommé était Veragua, à vingt-cincj
lii'ues plus loin sur l:i côte. Les habitants de Cariai ont frappé
Colombo et les hommes de ses équipages, comme ayant
parmi eux beaucoup de sorciers; et les matelots croyaient
ensuite avoir été ensorcelés par eux, pendant les nom-
breuses tempêtes et contrariétés de toutes sortes qu'ils ont
eu à supporter pendant le reste du voyage. Où étaient Ca-
riai? Carambaru? et Veragua? Ce dernier point est bien
lixé; c'est dans la grande baie de Chiiiqui sur la côte do
Cosla-Ilica; pays où l'on a trouvé dans ces dernières aimées
dos tombeaux d'aborigènes contenant de l'or comme l'indi-
ipie Colombo dans son récit : « Les grands du teri'itoire de
Veragua ont pour coutume de se faire enterrer avec tout
l'or qu'ils possèdent.» Carambaru était à une dislam ■ d'au
moins vingt-cinq lieues de Veragua, c'est-;Vdire Chiriqui,
ce qui nous ramène un peu au nord du rio San Juan et de
Greylown. Cariai devait être un peu plus loin vers le nord,
c'est-à-dire dans le voisinage de l'embouchure du rio Ulev.-
IleUls, où se trouvent plusieurs petites lies, ce qui correspond
au récit de Colundjo. IMainlenani ce pays est habité par les
Indiens Carcas, et l'une des branches du rio Blewlields se
nomme rio Carca. Ces Indiens Carcas travaillent encore au-
jourd'hui aux mines il'or de Santo-Domingo et de Liberlad
sur le rio Mico, uu autre aliluent du niewtields. Carambaru
devait être près du rio Hania, et dans le pays dos ludions
Hamas, Or ces Indiens Hamas et Carcas ont toujours résiste
à toute espèce de civilisaliou; la plupart, surtout les
l'aiiKis, S"ul tout à fait «auva;-;e-. ot ui> lai -ïonl perujuue
I
'-\m>}).^M^J^,l■^mJ'UtSl)'»lr<f^'9f''9^
4 SlJll l'origine du nom II AMKIUQL'E.
pénétrer dans leur pays; ils en sont restés absolument nu
mOmc point que lorsque Colombo les visita en 1502. On
sait avec quelle ténacité, les Indiens se rattachent h toutco
qui les environne. Eh bien, c'est parmi ces Indiens Carcas
et Ramas que se trouve lo lieu-dit Amihic ou Amérique,
formant une chaîne de montagnes, la plus élevée (prés de
3000 pieds) du pays, qiii sert de ligne de séparation entre
les eaux qui s'écoulent directement dans l'Atlantifiue, et
celles qui vont dans le lac de Nicaragua. D'après ceux qui
l'ont visitée en certains endroits, des environs de Libertad,
Juigalpa et Acoyapo, cette chaîne do montagnes est des
plus proéminentes; elle s'aperçoit d*^ loin, montrant des
pics nus et rugueux, isolés, avec d'énormes abruptes ou fa*
laises porpondiculaircs de couleur blanche; do plus son
élévation mûme divise le pays en deux parties tout ?i fait
distinctes et totalement différentes par leurs climats; à l'est
sont des forêts impénétrables, fi cause dos pluies presque
continuelles; tandis qu'i\ l'ouest de cette ligne de faîte, on a
un pays aride et sec par suite de manipiode pluie, les mon-
tagnes d'Amérique arrêtant totalement les vapeurs du côté
do l'Atlanticiue. Elles courent du nord-nord-ouest au sud-
sud-est; et viennent aboutir ;\ la côte Atlantique un peu au
nord de Greytown; les dernières raniiiications étant entiè-
rement dans le pays de ces Indiens sauvages et inaborda-
bles, les Hamas. On sait que partout rien .e change moins
que les noms de montagnes, de vallées, de lacs, de rivières,
en un mot que les Ucux-dils; les peuples disparaissent, et
ces noms restent. 11 est de la plus grande évidence que cette
dénomination de la chaîne et des rochers d'Amérique ou
Americ est un nom indigène, dont la terminaison en ique
ou ic, est commune dans les noms do lieux de la langue des
Indiens Lenca ou Chontales de l'Amérique centrale et il'une
partie du Mcxicpu^; ce nom s'est perpétué depuis la décou-
verte du Nouveau Monde, intact et sans altération, par suite
de l'étal de complet isolement dans lequel ont vécu les In-
«IWr- <»iiiM|i
mmmmmmm
Sun l'oiuginf. du nom d'améiuquiï. 5
tlii'iis lie celle parlie du oonliiienl, qui aujourd'hui comme
on 1502, lorsque Colombo les visita, nomment encore leurs
nionlagncs Amérique ou Amcric. Or ces montagnes sont
aiirirères; c'est ;\ k'ur i)iod que sont les mines d'or do Li-
Iteriad et de Sanlo-Domingo, cl de plus, l'or d'alluvions ou
des placers y est tout à fait épuisé, ce qui ne s'expliquo que
par une exj)loitalion antérieure à celle des Indiens eux-
môiiics; on ne trouve de l'or que dans les veines de quarlz
mêmes. Colombo dit que les Indiens lui ont cité plusieurs
noms do localités riches en or, noms qu'il ne donne pas
dans son récit Iris-abrégé, se contentant de citer le nom
(le la province de Ciamba; mais il est des plus probables
que ce nom d'Améritiue ou Americ a été prononcé souvent
par les Indiens, répondant aux demandes pressantes des
européens. L'avidité pour se procurer de l'or était telle,
chez ces premiers navigateurs, que c'était partout leur
principale préoccupation, et il est presque certain qu'à
leurs demandes continuelles aux Indiens Cariai ou Carcaï
(car ce mot a pu ûlre mal lu dans le manuscrit de Colombo,
où l'on aurait pris un c pOur un t) et Carambaru, d'où pro-
venait l'or qu'ils portaient comme ornements, — ces der-
niers auront répondu « de l'Americ », ce mot signifiant la
parlie la plus élevée et la plus proéminente de l'intérieur
des terres, le haut pays, le Landmark de la province de
(jiamba. Le nom Americ ou Amerrique était employé
comme les Alleghanys, les Ozarks, les Vosges, le Jura, les
Alpes.
De ce que le nom Amérique ne se trouve pas dans la let-
iera rarissima ou récit de Cristoforo Colombo à Sa Majesté
catholique le puissant roi d'Espagne, il ne s'en suit pas que
Colombo ne l'a pas connu. Son indication môme de l'exis-
tence de plusieurs noms de lieux non cités que lui ont dit
les Indiens, où l'or se trouvait, montre assez qu'il n'a pas
dit tout ce qu'il connaissail. D'ailleurs il ne faut pas perdra
de vue dans quelle circonstance pénible et fâcheuse il n
fl Sun l/ORIGlNE DU NOM D'AMÉRIQUE.
rédigé cl écrit sa lettcra rarissima, étant prisonnier, chargé
de fers par ordre du gouverneur Ovando, dans l'île do la
Jamaïque (encore un nom do lieu en ique); vieux, infirme,
dégoûté par toutes sortes de souffrances et d'injustices, Co-
lombo n'était pas dans une position à faire un rapport bien
complet. Aussi, de tous ses écrits, ce récit du quatrième
voyage est-il le moins clair, le moins précis. Le style en est
mélancolique, chagrin et assez confus. Il y a les plus grandes
probabilités pour que ce nom d'Amérique ou Améric ait
été souvent prononcé par les Indiens devant Colombo et
ses compagnons de voyage; et ce nom sera resté parmi
eux comme celui d'un El Dorado, non exploré, pas môme
entrevu, mais qui occupait l'intérieur des terres, dont ils
avaient reconnu les contours des côtes dans la province do
Giamba.
De retour en Europe, Colombo, etsurtout les hommes de
ses équipages, en racontant leur voj'age, se seront vantés
de la découverte de mines d'or, très-riches, dont leur avaient
parlé les Indiens de la côte du Nicaragua, en disant qu'elles
étaient du côté do l'Amérique. De là une sorte de popularité
donné au mot Amérique, comme nom vulgaire de la partie
des Indes découverte par Cristoforo Colombo, dans son
dernier voyage, où devaient exister les plus riches mines
d'or du nouveau monde. Car il ne faut pas perdre do vue
que toutes les expéditions de Colombo et des autres navi-
gateurs de cette époque avaient surtout pour but principal
et matériel l'acquisition de grandes richesses et la décou-
verte de mines d'or. Ce nom d'Amérique, synonyme du
pays de l'or par excellence, se sera répandu dans les ports
de mer des Indes occidentales, puis de l'Europe; et petit à
petit il aura pénétré dans l'intérieur du continent européen,
et c'est ainsi que le professeur-libraire de Saint-Dié, au
pied des Vosges, aura entendu ce nom d'Amérique, sans en
connaître la valeur, excepté comme désignant un pays des
nouvelles Indes très-riche en or. Comme ces découvertes
SUR l'originiî nu nom d'améiuqiiiî 1
faisaient alors l'objet des conversalions de tout le monde;
llylaccrnylus de Saiul-Dit'*, no connaissanlaiicunc^ relations
inii>i'i'"*^cs aiitresqiu; celles (VAlbcrirm Vespiiciiis, publiées
(Ml lalin en iWô et en iilleniand en 1501), crut voir dans co
prt^nom d'Albericm l'origino du nom pour lui corrompu et
.illéré iV Amérique ou Améric; renouvelant la fable du dau-
phin, il prit le FMrée pour un homme et dénomma celto
terre d'après le seul nom des navigateurs qui fut venu
jusqu'à lui, et qui présentât quelque analogie avec le mot
Amérique ou Améric. Pour cela il lui fallut modifier et
lorturer le prénom de Vespucius : d'Albcricun, Alberico,
Anierigo et Murigo, qui sont les diverses manières d'épcler
le prénom de Vespuzioou Vcspuchy, il fit Amcricus! Ainsi,
d'après ma manière de voir, ce serait par suite d'une erreur
d'Ilylacomylus que le nom aborigène du nouveau monde
Amérique, Amerriquc ou Améric a été européanisé, lati-
nisé et rapporté au fils d'Anastasio Vespucci. Si cette erreur
avait été commise en Espagne, en Portugal ou aux Indes,
elle aurait été évidemment relevée, car alors vivaient encore
Vespucci et beaucoup des compagnons de voyage do
Colombo. Mais à Saint-Dié, petite ville inconnue, et dont
le nom n'est môme probablement arrivé à la connaissance
ni de Crislcforo Colombo ni d'Alberico Vcspuzio, éloignée
de tous les ports ue mer, cet opuscule du libraire llyla-
cumylus est nécessairement resté limité h un petit cercle ;
c'est effectivement autour de ce petit cercle que l'erreur s'est
prolongée et propagée par les publications, à Strasbourg
ei. 1509, d'une nouvelle édition du livre d'Ilylacomylus, et
à Baie en 1522, de la première carte sur laquelle on lit :
America provincia.
Lorsque cette carte avec le nom America parut et parvint
en Espagne, Cristoforo Colombo était mort depuis long-
temps (1506); ses compagnons de voyage, presque tous
illettrés, étaient aussi ou morts, ou retournés dans les
Indes, et personne n'était plus là pour corriger l'erreur
I
8 ?i;U I.'oilIlilM' l»l NOM U AMLiUgri;.
d'II>laci)myliis, ci. sMppusaiit ([iif cetUuarlet'ii lit inciilion.
(M» avait onlciulij le nom (l'Aii)(f'ii(iue, non connnc lo nom
(riiii liuniiuc, mais bien comme celui d'un pays, d'imo
partie inilclcrmini^c du nouveau monde; on l'accepta sans
dinicullé et sans faire attention à rcnenr du libraire do
Saint-D'é, dont on no connaifisait piohahlement pasl'upus-
cuio. Il n'est gnèro douteux, en cllet, que si le nom d'Anic!-
ri(iiie n'eût élc' déjà un nom connu et i.iùme jus(iu'à un cor-
tain point assez populaire dans les poris do mer de î'Kspa-
gne, du l'ortuf^al et des Indes, on ne l'aurait pas acccnià
ainsi d'emblée et du premier coup sans discussions. El cola
d'autant plus qu'Hylacomylns, on outre de la modillcation
et de l'altération profondes qu'il faisait subir au prénom
Alb-rico, s'éloignait des règles gé. éralemcnt suivies dans les
dénominations de pa.v^, en donnant le prénom au lieu da
nom propre de son béros ; il aurai», dû appeler l'Amérique
Vespucciii ou Vi'Sjmhia. Les têtes couronnées, rois, cnq)e-
reurs, reines ou princes, ont seuls le privilège que l'on so
serve de leurs prénoms pour désigner do nouveaux pays.
Ainsi on dit : Détroit do Magellan, île de Vaneouver,
Tasmanic, île van Diemen, etc., et tandis que l'on dit
Louisiane, Caroline, Géorgie, Maryland, Pbilippines, Vic-
toria, etc., etc. Cette babilude do donner à de nouveaux
pays les prénoms dos découvreurs s'est d'ailleurs main-
tenue sans une seule exception mémo au sujet de Cris-
loforo Colombo; car personne n'a eu l'idée de donner lo
nom de Crisluforia ou Cbrislopbic à un pays, et celui do
Cristolbro ou de Cbrislopbe à une ville; tandis qu'on a
créé, à diverses époques, plusieurs Colombia, Colombie,
Columbh, Culumbus et Colon. Mais il y a plus : Hylacomylu..,
en rapportant à Vespucby l'bonneur de nommer le nouveau
continent, et se servant contre tous les précédents do son
prénom plutôt que do son nom, aurait dû le nommer:
Albericia ou Amerigia, ou Amerigonia, ou Aforigia et non
pas America. Et ce nom for-é péniblement ne devient
B
sru i-'oniciNK ut nom i. AMi;niQrE. tt
l'xpliral.o qu'on ndnielliinl qu'llyi; . ''vlus avait cnlcnilu
aiiparavanl prononcer lo nom Ai ^riquc ou Amcrir.
AnuTipo Vcspnchy, 'oinnit l'orlhofin phio Ciislororo Co-
Irinilto ilans sa leltre dal^'e doSc^'villo le 5 février IfiOf), élait
mort en 1512, e'csl-î\-diro longlcnips avant la piiblication
«le la (atle de ll.'.le, «lans Mda cutn comnH'uUtrii) Vadu i;
sans rien connaître de « la daiif^erensc , :)iic (pi'on loi pré-
parait à Saini-Uié », suivant l'expressiun de llinnhuldt, il
crut juscpi'A son dernier jour que les côtes do l'Asie étaient
le nouveau monde, et il mourut comme il avait vécu, pilolo
mayor de Indias.
Cette croyance aux Indes, à l'arrivée prochaine aux em-
hnuchures du Gange, a été la cause principale qui aempC'clié
Cdiond), SCS contemporains et ses successeurs de donner
un nom colleclif aur; terres décoiiverles. Cette idée ne pou-
vait venir qu'à des j-cns de l'intérieur des terres, ne con-
naissant pas pratiquement la navigation do ces tenips fié-
vreux d'enthousiasme de voyages; et qui, répétant les
on-dit des marins, appliquèrent, sans trop savoir ce qu'ils
(aisaient, un nom déjà connu de ceux qui revenaient des
Indes, mais sans position géographique précise, à tout un
gioupc de terres nouvelles alors à peine reconnues en bloc.
Celle erreur des géographes théoriciens et de cabinet de
Sai!it-l)ié, de Sirasbourg et de I5i\le, ne pouvait Être guère
corrigée (pie par Colomb, qui n'était plus do co monde.
Puis les découvertes doCortcz, delMzarre et autres vinrent
changer la direction des idées sur les pays i'abuleusement
riches en or.
Le Nicaragua, quoique conquis en 102-2 par Cil Gon/.ales
d'AviUa, resta en partie inconnu, surtout la région qui s'é-
lend entre l'Atlanlirue et le lac Nu\iragua, où so trouvent
les montagnes d'Amérique, Celle ignorance a été poussée
si loin, que mémo l'émigration californienne îi travers
rislhme do Nicaragua passa à côté de celle partie de l'Amé-
rique sans la connaître et la loucher en rien. On peut dire
I
10
siin i/oiulinl; nu m>\ it'AMLUnjut:.
(Iiu; 1,1 n'i^iim do lerro leriun onlro la mer des Caraibes et
la liyiic du faîlo dos eaux qui s'écoulcut dans le lac du Ni-
cara^'ua est encore ù l'iicuro qu'il est tout fi fait inconnuo;
!(s Indiens Carcas cl IJanias, surlout les derniers, ne laissant
personne aborder et explorer leur pays; ils repoussent
même les Indiens chercheurs du caoutchouc, qui depuis
dix années vont intrépidement poursuivre le.irs recherches
dan.-; des parties du pays tout i\ l'ait hirmccs jusqu'ici.
La version que je viens de présenter a de grands avantaf;es.
D'abord elle n'enlève rien à la gloire de (iristol'oro Coloudjo :
le nom du continent découvert par lui était un nom indi-
gène, qui d'une petite localité limitée s'est étendu à tout
le nouveau monde, grAcc à une erreur d'un libraire-éditeur
d'une petite ville perdue dans les Vosges. Les accusations
de plagiat, lancées contre Alberico Ves[)uzio, tombent et il
n'y a plus de raisons pour lui reprocher d'avoir imposé son
prénom, ou tout au nu)ins d'avoir laissé imposer son pré-
nom ;\ tout un continent; d'autant plus que son prénom n'a
jamais été Améric, mais bien Alberico ou Amerigo. Le nom
Amérique, tout en étant aborigène, ne crée p-is de confusion
entre la partie et le tout; parce que la localité où il exisie
comme lieu-dit est trop petite, trop insigniliante et trop
cachée pour donner lieu fi des interprétations fausses ou
doubles. Enlih, ce nom paraît admirablement choisi, p;urc
qu'il s'étend du centre même aux extrémités du conlinenf,
rayonnant, donnan! la main au nord et au sud, regardant
les Antilles et le Paciliiiue, et étant au milieu même de
cette arôte do montagnes immenses, la plus longue qu'il y
ait sur notre globe, et qui s'étend de la Terre de l'eu aux
bords de la rivière INIakenzie, fnrmant l'épincî dorsale de
l'hémisphère occidental. 11 est bien choisi aussi, parce (pi'il
est fort probable qu'il a frappé les oreilles du grand amiral
C-olond) pendant son quatrième voyage, et que l'illustre dé-
couvreiu- du nouveau monde a été le [iromier ICuropéen
«iui ail enl''ndu cl proii^icé le ui-iii Auiériiiuc ou .\méric,
srn i.'dniGiNr: or nom d'ami't.ioit.
Il
(liioiqiic lu.us iiVn possédions pns la ccrliliKlc et la jircuw
iiiaK'Tiello. Si ro nom avait apparlcmi j\ quelques paiiios
dos oxlirmilcs du nord ou du sud du conliuenl, il est pou
probable qu'on Tofit aooopLé aussi faoilomenl; mais il pro.
nail, le nouveau monde poui- ainsi dire par le milieu du
rorps, vaguement, sans si-nilioalion autre que celle do
n'-Kiou Iros-richc on mines d'or; et on l'employa et l'ac
copia sans penser en rien au pilote Alborico Vesi)uzio; co
n'est que longtemps o'- '-s qucles discussions entre savants
géographes s'élevèrem, et que la , osse erreur d'Hyla
comylus s'itnposa comme une véiitô. En un mol, le nom
■\iii('ri(pio est américain.
C.,im!ii'iil;4v, .MissiK'lmsclt.-, le 8 (|,'cenilnv 187*
PAfiis. _. ijirniHnmB ob b. MAniiNEi, nuu mig:.jn, J